samedi 23 octobre 2010

Subjectifs objectifs

Des mirettes panoramiques sur l'actualité du monde, ça vous dit ?  Try " The Big Picture ".
Vous trouvez cet oeil-de-boeuf un peu creux car sans contenu ?
Essayer Frozn Piglet dans " C'est beau la photographie " ( Merci Marc) . Cuidao !!! contenu d'accord mais décalé, impertinent et je m'enfoutiste. ouis, je m'enfoutiste impliqué.

mardi 6 juillet 2010

Causeur cause


A lire, un article  paru sur le blog de Causeur et qui arrive ici grâce à l'ami Grandchamp (c'est le passage sur les flacons qui a certainement influé pour qu'il m'en parle ). c'est signé Jérôme Leroy.

Vivre plus pour buller plus
Un programme de riches qu'il faut appliquer aux pauvres


“Nous allons vivre de plus en plus longtemps et donc il va falloir travailler plus longtemps: nous en sommes tous d’accord.” Cette déclaration faite par Martine Aubry en juin 2010 semble parée de l’évidence du bon sens. Ce qui donne furieusement envie de la contester. Et les arguments ne manquent pas.


On a beau fumer, boire, se droguer, rouler vite, avoir des pratiques sexuelles à risque, vivre dans un environnement pollué, se nourrir de nourritures trafiquées par l’agro-industrie et boire des vins trop soufrés gorgés de levures exogènes, l’espérance de vie augmente. Bon, ce n’est pas de notre fait puisque nous, nous nous honorons d’une mauvaise réputation due pour l’essentiel à la pratique, parfois simultanée, de plusieurs des vices susnommés.

Il n’en demeure pas moins qu’une petite fille sur deux qui naît ces jours-ci sera centenaire. Pour ceux que ça intéresse, il vaudra donc mieux faire sa connaissance dans vingt-cinq ans que dans soixante-quinze. Que faire de ce temps libéré grâce notamment aux progrès de la médecine ? Fumer encore plus ? Boire de meilleurs flacons ? Multiplier encore les partenaires ? Ecouter des musiques lascives et lire des textes subversifs ? Et cela pendant les dix, vingt, trente ans à venir, une fois libérés de l’aliénation du travail ?

Même Dieu s’est reposé le septième jour

Eh bien, ne rêvez pas !

Un des principaux arguments utilisé par tous les politiques, et pratiquement admis comme allant de soi chez les syndicats est que oui, l’espérance de vie en augmentation justifierait que l’on travaille plus longtemps. Cela a l’air tellement logique, dit comme ça, tellement pétri de bon sens.

Il s’agit pourtant d’une illusion de sagesse, “une sagesse ingénieuse à se tourmenter, habile à se tromper elle-même, qui se corrompt dans le présent, s’égare dans l’avenir…”, aurait dit le Bossuet de l’oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre. Il n’y a, de fait, aucune raison philosophique, théologique, métaphysique à travailler plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps. Dieu lui-même Qui dispose pourtant d’une très grande espérance de vie a décidé de limiter Son œuvre à six jours, et le septième, Il se reposa, et il semble bien, étant donné l’état de la planète (carnages, famines, catastrophes écologiques, crises systémiques et récurrentes du capitalisme) qu’Il n’ait pas décidé de reprendre une quelconque activité jusqu’à présent.

L’espérance de vie et son augmentation, sont un don. Un don qui a coûté cher à ceux qui l’ont fait : c’est le don du travail des générations précédentes qui mouraient à la tâche dans les mines et les hauts-fourneaux. Leur travail a permis, comme disait déjà Descartes, “de nous rendre maître et possesseur de la nature”. Et pourquoi de tels sacrifices ? Par pulsion prométhéenne, par désir d’égaler Dieu ? Ou plus simplement pour construire un monde vivable pour vivre plus longtemps, justement ?

La richesse des riches, ce n’est pas l’argent mais le temps

Vouloir nous faire travailler plus parce qu’on vit plus longtemps, c’est donc une injustice et une punition, certainement pas du bon sens.

Injustice : c’est le Travail qui a permis les gains de productivités du Capital (Les Français, en la matière, contrairement aux idées reçues, ont une des meilleures productivités au monde.). Ces gains ont été redistribués de manière complètement marginale depuis la révolution industrielle : on a gagné le droit à quelques heures dans la semaine, quelques semaines dans l’année et quelques années sur une vie. Vouloir revenir en arrière en augmentant la durée du travail pour espérer ralentir la baisse tendancielle du taux de profit du capitalisme, c’est tout simplement comme si on décidait que des septuagénaires devraient monter sur des échafaudages pour terminer une dernière villa de luxe, sachant qu’ensuite, de toute manière, le propriétaire n’aura plus les moyens d’en construire une autre.

Punition : vouloir empêcher que sur des années entières des gens encore en bonne santé puissent profiter d’un temps libéré est en fait un moyen d’empêcher le monde du travail de découvrir ce qui fait la richesse des riches et qui n’est pas l’argent mais le temps.



On se souvient d’un de ces sociologues ou économistes médiatiques qui avait poussé l’indécence jusqu’à dire que du temps libéré pour les cadres, c’était très bien car ils allaient au théâtre et voir des expositions mais que pour les prolos, c’était du temps utilisé à boire, à jouer à des jeux de hasard, à battre leur femme et plus si affinités. Les gens riches, remarquait Fitzgerald, sont vraiment différents. Et on a vu ces dernières années que des gens riches, en France, c’était comme les pauvres, il y en avait de plus en plus. Ils le sont tellement que c’est eux qui vivent dans la société rêvée par Marx (qu’ils ont bien lu en général) : “une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous”, ce qui pourrait être la devise de nombre de country-clubs. La différence, c’est qu’ils ne l’appliquent qu’à eux-mêmes, alors que le communisme enfin réalisé serait un beau country-club planétaire.

Nous n’irons pas ici jusqu’à lancer comme modèle le célèbre slogan situ “Ne travaillez jamais” qui fleurit en mai 68 et qui avait une certaine grandeur mais “Ne travaillez pas trop. Ni trop longtemps”.

Il n’y a aucune raison pour ça, vraiment aucune.

samedi 10 avril 2010

Ne pas vivre les yeux fermés


Le collectif item réunit 4 photographes Marc Bonneville, Franck Boutonnet Romain Etienne et Bertrand Gaudilère.
Collectif, n'est pas une etiquette mais une façon de travailler et de décider ensemnble pour défendre des valeurs commues. Un engagement qui ne concerne pas que le choix des sujets, mais aussi la facon de faire au quotidien.
L'image est notre langage. Elle fait débat. Nous la conjuguons au singulier comme au pluriel.
Les travaux personnels et collectifs sont une voix pour témoigner du monde qui nous entoure, le contester ou l'interroger, parce qu'un photographe ne peut pas vivre les yeux fermés.
( extrait du site du collectif )

mercredi 24 mars 2010

Une prière au Saint Pou

le 8 Avril sera El dia internacional del Pueblo Rom y Gitano .
lors de cette journée festive et militante on évoquera certainement les effroyables années où le peuple dit " tsigane " fut victime de la politique d'extermination du III° Reich.
Des historiens ont fait leur travail. ( Henriette Asséo et Denis Pechanski notamment ) mais, même si les choses bougent et que le dernier film de Gatlif donne une visibilité à ce point d'histoire jusque-là plutôt confiné au monde universitaire, il n'en reste pas moins  que le génocide de ce peuple , qu'il faut nommer " Samudaripen " en langue romani , fait l'objet de peu d'écho dans la mémoire collective.



Cette entrée me permet de rendre hommage à ce fanal poético-politique  qu'est Jerzy Ficowski avec ce texte :

UNE PRIERE AU SAINT POU *


C'était au printemps de 1944
pendant l'épouillage du bloc gitan
au camp d'Auschwitz Birkenau

les jupes les châles
se fanaient à l'épouillage
dans le camouflage de leurs couleurs


coquelicots iris bleuets
au cas où un champ
qui n'adviendra jamais


La Gitane dans les douches de birkenau
dépouillée de ses couleurs
tient son poing serré
vêtue
de longs plis d'eau


elle cache dans sa main
un grain de vie
une semence de secours
entre la ligne de vie
et la ligne de cœur
au croisement des chemins
de la chiromancie


elle cache dans son poing
le dernier pou
un pou s'en va toujours
quand arrive la mort
la Gitane chante
aux douches de birkenau


svanta djouv
na dja mandyr


saint pou
ne m'abandonne pas
je ne te laisserai pas partir
toi seul m'es resté
il n'y a pas de dieu en enfer


tes frères abandonnent
nos morts
reste avec moi
sauve-moi
saint pou


le kapo accourut avec sa cravache
tord les doigts
qu'est-ce que tu tiens là voleuse montre
ce brillant
cette pièce cet or

le pou est tombé
l'étoile est tombée


reste une paume vide
un ciel vide
où monte
fumée après fumée
fumée après fumée.

Jerzy Ficowski
( " Tout ce que je ne sais pas " traduit du polonais par Jacques Burko / Buchet-Chastel / collection Poésie, 2005 )

* Les Gitans croient que, mus par l'instinct, les poux abandonnent celui qui va mourir, un peu comme les rats quittent un navire condamné (NdT)

nb : Ce poème a également été publié dans le n° 36 de la revue Diasporiques dans un dossier que Jacques Burko a consacré à la poésie polonaise face au génocide ( source :  Florence Trocmé site Poezibao ).



jeudi 14 janvier 2010

Haïti



Haïti, liée au souvenir d'une rencontre brève mais intense au Glob Théâtre de Bordeaux avec un de ses poètes qui souffle le vent  des exils apatrides pour mieux récolter ses attaches ( le Canada étant devenu la seconde demeure familiale , celle des résistances ) : Joël Des Rosiers.
il y avait Nicole et Didier et amenés par Marie, des visages plus jeunes aussi, pendus d'abord à nos lèvres et puis aux siennes. offrande de la lecture puis des écoutes.
aujourd'hui c'est vers ce souvenir que je me tourne et ses palétuviers, ce vétiver pour couturer  la douleur en fragments.

 " la piste
longue épitaphe pour les arbres disparus
honneur respect gommiers calebassiers
sentiments semés dans la poussière
quelquefois
la douleur au bout de la langue
s’élance la jeep cinq heures fauves
sucer
ton pouce dans l’absence des années
hormis les herbes amères l’horreur de perdre
l’enfance
il est odieux de ne pas pleurer "

( Joël Des Rosiers / savanes / 1993 / éd. tryptique )

dimanche 3 janvier 2010

Pour qu'il sourit, para siempre



" Dans un champs, la montre du tableau de bord reste bloquée à 13h55 ".
ces mots, à la page 753 de la bio d' Olivier Todd consacrée à Albert Camus, sont un peu détrempés dans l'exemplaire que je possède.
si quelqu'un lèche la page il y trouvera un goût de sel.
pas celui des "Noces" ou de "l'été", mais le lacrymal, oui.
j'ai donc un rapport romantique, charnel, puissant et passionné avec l'écrivain , l'homme révolté, le journaliste de "Combat", l'algérois de Belcourt, le prix nobel, l'ami de Char, le soutien indéfectible de l'Espagne de la libre pensée, l'auteur de certaines des plus belles pages de la littérature du XX° siècle. n'en déplaise aux contempteurs.
il fut de bon ton de lui passer le couteau du fiel ou de l'indifférence sous la gorge ( un auteur pour classes de terminales...ouais...et alors ? dévorer Stevenson quand on a dix ans n'est-ce pas fondamental ? et Marx, il faut le lire à quel âge ? si c'est pour le comprendre à 80 piges, on voit le parcours ).


aujourd'hui, on se complait à l'encenser. surtout dans le camp vers lequel, s'il vivait, il n' aurait que son mépris à retourner.
Jeanyves Guérin, qui a dirigé l'excellent dictionnaire Albert Camus ( collection "Bouquins" chez Laffont ),  n'en pense pas moins :
« Celle de Camus ( nb : il parle de récupération ) par Sarkozy est idiote et scandaleuse. La politique sarkozyste est anticamusienne au possible. Camus, qui n'a jamais appelé à voter que pour Mendès France, n'aimait pas fréquenter les hommes politiques, ... "Combat" ne leur a jamais donné une tribune, et lui-même a refusé de déjeuner à l'Elysée avec de Gaulle.»

car le pouvoir voudrait le panthéoniser.
c'est à dire le tuer une seconde fois. ou le replonger dans l'oubli , le dédain, l'ostracisme dont il fut victime après son prix et ensuite, après 68, quand même Bourdieu, mon cher Bourdieu, s'en prit à la figure de celui dont il aurait dû percevoir cet élan qui jamais ne le fit passer du côté des héritiers, puisque non issu de cette souche (bien au contraire, allez trouver un personnage public plus prolétaire de par ses origines ! ) mais qui non plus au cours de sa vie n'adopta ou ne copia leurs manières.




des erreurs ?...ben , évidemment ( on ne va pas lister ses clairvoyances, aujourd'hui il y a pléthore de distribution de bon points par la clique à claques ).
pas à foison, mais tout de même.
son passage " à côté " de cet "inconscient colonial" ( E. Saïd ) qui nimbait sa manière de ne pas parler vraiment de l'aspiration des peuples à disposer d'eux-mêmes, par exemple. pourquoi le planquer ?
il n' y aucune raison et , a contrario , il faut s'en emparer pour mieux cerner les positions intellectuelles de tout un chacun de cette époque pour mieux éprouver les nôtres aujourd'hui.

alors , ce panhéon ?
"laissons-le à Lourmarin", a-t-on dit avec justesse ( certains pensent différemment, pour de bonnes raisons et eux, je les respecte, mais ma raison , ici , ne commande rien, je lui désobéis. ).
mais oui, nom de dieu ! laissons ses os tranquiles. dans un silence et une nature qui n'appartiennent à personne.
Camus le maritime, l'amoureux des épines dans ce sépulcre minéral ? quelle horreur.



et puis soyons réalistes , qui a écrit ceci :

"chaque fois que j'entends un discours politique ou que je lis ceux qui nous dirigent, je suis effrayé depuis des années de n'entendre rien qui rende un son humain. ce sont toujours les mêmes mots qui disent les mêmes mensonges."

qui , alors ?
Camus ?
oui, Camus qu'on entendra loué si jamais le président de ce gouvernement dont un ministère s'intitule " de l'immigration et de l'identité nationale " s'obstine à nous faire croire qu'il s'est converti à ce un trait remarquable de l'écrivain  : le "non-conformisme"  ...


alors, pro-Camus après que d'être anti-sarkosyste primaire ?
peut-être.
mais en s'appuyant sur ce que fut l'homme de lettres et l'homme tout court.
car demain : socialiste libertaire , le pote à Arnaud, Bouygues, Bolloré et consorts ?
allons, un peu de sérieux.
pense-t-on que l'auteur de "l'homme révolté" puisse être porté aux nues par celui qui a dit à Dakar que certains n'étaient pas encore entrés dans l'histoire ?
qui peut s'imaginer, sans éclater de rire ou de larmes, Guaino préparant une bafouille, le stylo entre les dents, pour honorer celui qui disait des semblables de cette bête de somme du pouvoir qu'ils sont " des hommes sans idéal et sans grandeur " ?
etcetera, etcetera...  ( et pourtant le Mimi , il m'exaspère ).



Catherine Camus prendra, paraît-il, sa décision demain d'apporter ou non son soutien à l'initiative élyséenne. son frère jumeau, Jean, a déjà répondu par la négative.
chère Catherine, bon sang ne saurait mentir.
vous avez dit il y a quelque temps préférer "ramasser des olives" plutôt que d'entrer en polémique. quelle magnifique réponse.
restez-en là. dans le doute, l'écrivain-philosophe, votre père avant toute chose,  aura toujours préféré s'abstenir que d'asséner. pensez-y.
alors, de Lourmarin à Tiphasa, tous les oliviers ploieront pour vous rendre grâce.
et Albert , para siempre , sourira, soyez-en sûre.